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Avoir un plan d'urgence, ce n'est pas une nouveauté en soi. " On retrouve déjà des plans d'urgence dès 2800 AV.J-C. chez les Égyptiens ", note le Pr Frédéric Thys qui a présenté le PUH lors du dernier congrès de l'Association francophone des responsables techniques et de sécurité des institutions hospitalières (AFTSH).C'est que prévoir l'urgence est une nécessité. " Lors d'une catastrophe, l'important est d'avoir une bonne équation entre besoins et moyens. Il faut avoir les bonnes personnes au bon moment. Comment ? C'est la quadrature du cercle. "Les acteurs hospitaliers ont tendance à avoir une confiance exagérée en leurs capacités en situation de catastrophe, estime le Pr Thys. " Ils pensent qu'une situation de catastrophe induit simplement une extension de leurs activités quotidiennes et que leurs actions seront exactement les mêmes. C'est bien entendu totalement faux. Seule une préparation adéquate va permettre de contrôler le chaos qui s'installe. La saturation d'un service liée à une catastrophe et le contexte impliquent des comportements différents d'un individu à l'autre. Certains fuient, d'autres sont hébétés : il faut un temps d'adaptation. "" On n'est jamais prêt. Même un urgentiste spécialisé en médecine de catastrophe ", renchérit le chef du pôle d'appui clinique aigu au Grand hôpital de Char-leroi (GHDC) . " Notre formation nous a appris une méthode de tri. On a une certification. On est prêt à gérer la catastrophe. Mais à l'hôpital, la situation est complexe. Un incendie, une inondation, une coupure de courant, une panne informatique...Il n'y a pas que des problématiques de soins. Raison pour laquelle chaque situation doit nous ramener à des standards de préparation et de gestion pour travailler de manière adéquate. Aucun de nous ne sait ce que nous savons ensemble : il faut communiquer plus. On doit se rencontrer davantage autour de ces situations pour mettre en place une meilleure approche de ces situations. "La Belgique était pourtant précoce en médecine d'urgence. La discipline naît dans les années 60 et de nombreux plans d'urgence étaient déjà mis en place dans nos hôpitaux. " Mais globalement, le contrôle était administratif ", constate Frédéric Thys.Les attentats de 2016 ont changé la donne. " Lors des attentats de Bruxelles, on a vu arriver des gens qui voulaient rendre service. Mais ils nous dérangeaient. La téléphonie était bloquée, il a fallu passer par whatsapp. Ces événements nous ont fait évoluer. Il y a eu une prise de conscience de tous les acteurs concernant la chaîne de responsabilité et des difficultés que cela pouvait entraîner. "" Nous nous sommes demandé si nous étions préparés à ce genre de situation. Et nous nous sommes rendu compte que 35% des hôpitaux n'avaient pas de plan d'urgence approuvé administrativement. Et que seulement 49% avait fait un exercice de déploiement étendu. Enfin, seulement un tiers des hôpitaux avaient effectué un exercice de table. "Le PUH est né de ce constat, avec la volonté de mettre un place un plan d'urgence commun à tous les hôpitaux. Le PUH est composé de trois grandes parties : la partie pré-incident (prévention, préparation), la maîtrise de l'incident, et post-incident avec les enseignements à tirer de l'événement survenu.Le moteur du changement Mash vers PUH est la cohérence, notamment pour les événements qui surviennent hors des hôpitaux et où une bonne communication avec la police ou les pompiers est essentielle.Première nouveauté du PUH : deux piliers, l'un médical (PUH Med), l'autre technique (PUH Tec). Le plan médical comporte de nombreux volets tels que l'intervention médicale en tant que telle, mais couvre aussi les risques psychosociaux, sanitaires et les risques liés aux manifestations. " Quand vous allez voir un match de football à haut risque, une équipe d'urgentistes s'est réunie au préalable pour mettre un plan de prévention ", explique le Pr Thys.Deuxième nouveauté : la responsabilité du directeur général. Le PUH Tec est élaboré par le conseiller en prévention et le directeur technique, tandis que le PUH Med est élaboré par le directeur médical. Tous deux sont sous la responsabilité du directeur général.Plusieurs autres nouveautés caractérisent le PUH. Il faut désormais une approbation à différents niveaux clés. La terminologie est uniforme. Un exercice annuel est prévu. Il faut une liste de risques spéciiques liée à l'implémentation géographique de l'hôpital. Le 112 permet un tri de l'urgence afin de déployer le PUH de manière limitée ou générale. Le phasage est également différent : " Avant, nous parlions de pré-alertes, d'alertes, etc. Aujourd'hui, il s'agit de phases d'information et de phases d'action ", détaille Frédéric Thys.On notera enin que le PUH prévoit de s'attaquer aux problématiques de manière thématique : prise d'otage, alerte à la bombe, catastrophe naturelle, coupure d'électricité, intoxication alimentaire, mais aussi incendie, explosion, effondrement d'un bâtiment, problèmes, d'eau, de téléphonie, vague de chaleur, vague de froid...Chaque institution s'est vue présenter le plan et a pu connaître ce qui était attendu d'elle, grâce à une structure planifiée du PUH disponible sur internet sur le portail du SPF Santé publique.Le travail est titanesque, et implique des freins institutionnels qu'il faut lever. " Cela met du temps de faire un PUH. Car il faut faire un cadastre de l'existant, une analyse des risques, une prévention, une préparation et une identification des responsables. Ce qui fait beaucoup d'allers-retours. C'est un travail de fourmis ", reconnaît Frédéric Thys.L'intéressé implémente - pas tout seul, heureusement - le PUH du GHDC, hôpital réparti sur six sites. Une autre difficulté. " L'idée, au départ, était de réaliser un PUH général pour le décliner spécifiquement sur chaque site. Finalement, c'est trop compliqué. Début juillet, nous avons recommencé la mise en page pour ne réaliser qu'un seul PUH. Cela nous semble plus cohérent. "Autre frein potentiel : une mauvaise réaction du personnel. Il s'agit de faire un travail pédagogique qui ne doit pas effrayer le personnel lorsqu'il découvre le PUH pour la première fois. " Au GHDC, nous avons réfléchi aux termes employés quand il faut gérer une fusillade par exemple. Il faut que la personne en place au moment de l'événement arrive à réagir et ne soit pas sidérée. "Outre les freins, le PUH, malgré ses atours très théoriques, se veut très pratique. " À Charleroi, nous passons beaucoup de temps à rendre le PUH le plus pratique possible. Il y a des fiches d'action avec des consignes générales et des consignes spécifiques pour faire face à toutes les situations ", pointe le Pr Thys. " Il faut parfois gérer des choses simples, comme où les personnes garent leur véhicule. "Enfin, le PUH se relève un outil dans l'ère du temps, notamment car il implique une bonne communication multidisciplinaire. " Pour gérer autant de situations - tant médicales que techniques - cela nécessite de créer plus de pont entre les professions techniques et médicales d'un hôpital ", estime Frédéric Thys, qui conclut sur la nécessité de faire des exercices de simulation, en profitant des nouvelles technologies. " On ne fait pas assez d'exercices catastrophes pour arriver à un certain niveau de compétence. On peut pourtant pleinement s'immerger grâce à la réalité virtuelle. On doit s'inspirer du degré d'exigence de l'aéronautique. "