Depuis le 1er janvier 2018, les hôpitaux belges doivent disposer d'un dossier patient informatisé (DPI). Quels sont encore, en 2019, les obstacles au développement du dossier patient informatisé dans les hôpitaux ? Qu'est-ce qui a changé depuis l'introduction de l'obligation pour les hôpitaux d'avoir un DPI ?

Melchior Wathelet, CEO de Xperthis : Un obstacle au développement du DPI est le coût pour l'hôpital. Il reste élevé.

Il a fallu aussi un changement de mentalité...

En effet, le changement de paradigme n'est pas terminé, mais le DPI est désormais plus vu comme une opportunité que comme une contrainte. Il y a une prise de conscience qu'il faut aller vers un DPI intégré et que l'échange des données a une valeur. Tous les acteurs ne connaissent pas encore le chemin pour y arriver. Comment l'IT doit s'implémenter, jusqu'où faut-il aller, que faire pour que tous les professionnels hospitaliers puissent communiquer au niveau applicatif, quelle est la véritable plus-value pour les utilisateurs... ? Nous n'avons pas encore toutes les réponses à ces questions, mais tout le monde est désormais convaincu qu'il faut aller dans cette direction. C'est un peu comme la marche pour le climat. L'enjeu climatique est là, mais on ne sait pas encore très bien comment on va l'appréhender.

En tant qu'opérateur, avez-vous également dû vous adapter ?

Nous avons évolué par rapport à notre stratégie et notre capacité financière. Nous avons eu des questionnements sur l'opportunité de rassembler un certain nombre d'acteurs. Nous avons pris la bonne direction. Les premiers tests de notre nouveau produit Xperthis CARE se sont très bien déroulés. Notre situation financière est plus saine. Nous réengageons: 20 personnes en 2018 et 30 en 2019. Nous avons relancé de façon plus étroite la collaboration avec les clients. Nous réintégrons l'ensemble des hôpitaux dans notre vision. Xperthis a retrouvé une capacité d'innovation dans ses nouveaux produits et une attractivité par rapport à une série de partenariat. L'écosystème que nous sommes en train de créer - le partage d'outils similaires entre différents hôpitaux - permet d'intégrer beaucoup plus rapidement que par le passé des solutions innovantes, parfois développées par d'autres firmes. L'hôpital qui croit que son DPI est abouti se trompe. Il ne le sera jamais parce qu'il va continuer à évoluer.

Xperthis a connu des moments difficiles. De nombreuses personnes étaient sceptiques. Nous avons dû faire face à une série de rumeurs qui circulaient dans le secteur. Certains hôpitaux ont posé d'autres choix en adoptant d'autres solutions que les nôtres. Ce qui nous pousse à être meilleurs.

De la théorie à la pratique

La construction des réseaux hospitaliers favorise-t-elle l'adoption de DPI par les hôpitaux ?

La rareté de l'argent induit un plus grand besoin d'efficience. Je ne rencontre pas un seul gestionnaire hospitalier, médecin ou utilisateur de nos produits qui ne dit pas qu'il faut apprendre à travailler davantage ensemble. Ils veulent accompagner la révolution hospitalière en cours. L'aspect informatique en fera partie. Est-ce que cette transformation est assez rapide ? Il aurait s'en doute mieux valu que les hôpitaux puissent passer d'un système à l'autre rapidement et que le cadre juridique soit clair. J'ai appris d'une expérience professionnelle précédente (en tant que ministre : NDLR) que tout est toujours plus facile en théorie qu'en pratique. Nous voulons jouer un rôle dans cette transformation du secteur. Le groupe NRB nous a permis de véritablement investir dans l'avenir et d'accompagner les hôpitaux dans leur changement. Le fait que nous soyons un acteur extrêmement important au niveau du DPI dans les hôpitaux francophones et au niveau de la gestion administrative et financière (via les outils Oazis et ERP4HC) du côté néerlandophone nous permet de soutenir l'évolution des hôpitaux. Plus on utilisera les mêmes outils informatiques au sein des réseaux et entre les réseaux, plus cette cohérence technologique sera bénéfique pour le patient. Plus les partenaires qui proposent des produits de niche pourront "dialoguer" avec le DPI, plus cela aura du sens.

Qu'en est-il de vos relations avec les réseaux santé ?

Nous tenons à amplifier nos relations avec l'ensemble des réseaux de santé pour améliorer encore le flux des informations. Notre positionnement n'est pas identique au nord et au sud du pays. En Flandre, avec notre produit administratif, nous avons la volonté de travailler avec l'UZ Brussel, la KU Leuven, et les autres acteurs ... pour que l'ensemble du flux administratif soit uniformisé et que le partage d'informations optimalise l'efficience des hôpitaux, toujours dans l'intérêt du patient. Cette expertise acquise avec l'intégration d'autres systèmes nous permet de renforcer notre position sur l'ensemble du territoire, aussi bien sur les aspects administratifs que médicaux.

Appropriation des technologies

Vous proposez, en partenariat avec la société Nuance, l'utilisation d'un logiciel de reconnaissance vocale, basée sur l'intelligence artificielle (Dragon Medical Direct). Il été installé au Grand Hôpital de Charleroi. Comment cette collaboration fonctionne-t-elle ?

Melchior Wathelet : Actuellement, les hôpitaux ont plus besoin d'une solution belge qui corresponde à leurs besoins spécifiques plutôt que d'avoir une solution étrangère qui vient leur imposer une nouvelle manière de travailler. Nous devons gérer de façon transversale les demandes de nos clients pour faire avancer notre DPI. Comme nous ne pouvons pas tout produire, nous proposons des partenariats avec d'autres entreprises. Pour la reconnaissance vocale, nous collaborons avec la société américaine Nuance. Nous faisons une sorte de certification mutuelle. Il n'y a pas d'exclusivité mais nos clients savent que nos logiciels s'intègrent parfaitement. Nous collaborons également avec Earlytracks qui est un acteur spécialisé dans la structuration de données non structurées et Capsule qui est spécialisé dans la connectivité des appareils médicaux. Notre logique est de dire aux hôpitaux qu'ils ne doivent pas arrêter les partenariats qu'ils ont construits avec ces sociétés. Au contraire, nous leur proposons de maximaliser l'investissement qu'ils ont déjà réalisé.

En proposant une solution de reconnaissance vocale aux médecins, nous renforçons leur envie d'utiliser notre DPI. Nous essayons d'ailleurs de faire comprendre aux hôpitaux que dans un projet informatique, la dimension humaine est aussi importante que la dimension technologique. Il est très difficile de créer un sentiment d'adoption par rapport à une nouvelle technologie. Nous comptons d'ailleurs faire appel à des entreprises spécialisées dans la formation, l'adaptation et l'appropriation. C'est un véritable métier.

Entretien réalisé par Vincent Claes

Soins à basse variabilité : nécessaire adaptation de la facturation

Melchior Wathelet ne cache pas que les délais qui ont été imposés aux hôpitaux et aux sociétés qui produisent les logiciels de facturation pour basculer vers le financement des soins à basse variabilité le 1er janvier 2019 étaient très serrés. "Notre logiciel Oazis a été adapté, alors même que les informations sont arrivées très tardivement. Si on nous avait laissé plus de temps pour modifier notre logiciel, l'adaptation aurait été plus facile."

Depuis le 1er janvier 2018, les hôpitaux belges doivent disposer d'un dossier patient informatisé (DPI). Quels sont encore, en 2019, les obstacles au développement du dossier patient informatisé dans les hôpitaux ? Qu'est-ce qui a changé depuis l'introduction de l'obligation pour les hôpitaux d'avoir un DPI ?Melchior Wathelet, CEO de Xperthis : Un obstacle au développement du DPI est le coût pour l'hôpital. Il reste élevé.Il a fallu aussi un changement de mentalité...En effet, le changement de paradigme n'est pas terminé, mais le DPI est désormais plus vu comme une opportunité que comme une contrainte. Il y a une prise de conscience qu'il faut aller vers un DPI intégré et que l'échange des données a une valeur. Tous les acteurs ne connaissent pas encore le chemin pour y arriver. Comment l'IT doit s'implémenter, jusqu'où faut-il aller, que faire pour que tous les professionnels hospitaliers puissent communiquer au niveau applicatif, quelle est la véritable plus-value pour les utilisateurs... ? Nous n'avons pas encore toutes les réponses à ces questions, mais tout le monde est désormais convaincu qu'il faut aller dans cette direction. C'est un peu comme la marche pour le climat. L'enjeu climatique est là, mais on ne sait pas encore très bien comment on va l'appréhender.En tant qu'opérateur, avez-vous également dû vous adapter ?Nous avons évolué par rapport à notre stratégie et notre capacité financière. Nous avons eu des questionnements sur l'opportunité de rassembler un certain nombre d'acteurs. Nous avons pris la bonne direction. Les premiers tests de notre nouveau produit Xperthis CARE se sont très bien déroulés. Notre situation financière est plus saine. Nous réengageons: 20 personnes en 2018 et 30 en 2019. Nous avons relancé de façon plus étroite la collaboration avec les clients. Nous réintégrons l'ensemble des hôpitaux dans notre vision. Xperthis a retrouvé une capacité d'innovation dans ses nouveaux produits et une attractivité par rapport à une série de partenariat. L'écosystème que nous sommes en train de créer - le partage d'outils similaires entre différents hôpitaux - permet d'intégrer beaucoup plus rapidement que par le passé des solutions innovantes, parfois développées par d'autres firmes. L'hôpital qui croit que son DPI est abouti se trompe. Il ne le sera jamais parce qu'il va continuer à évoluer.Xperthis a connu des moments difficiles. De nombreuses personnes étaient sceptiques. Nous avons dû faire face à une série de rumeurs qui circulaient dans le secteur. Certains hôpitaux ont posé d'autres choix en adoptant d'autres solutions que les nôtres. Ce qui nous pousse à être meilleurs.De la théorie à la pratiqueLa construction des réseaux hospitaliers favorise-t-elle l'adoption de DPI par les hôpitaux ?La rareté de l'argent induit un plus grand besoin d'efficience. Je ne rencontre pas un seul gestionnaire hospitalier, médecin ou utilisateur de nos produits qui ne dit pas qu'il faut apprendre à travailler davantage ensemble. Ils veulent accompagner la révolution hospitalière en cours. L'aspect informatique en fera partie. Est-ce que cette transformation est assez rapide ? Il aurait s'en doute mieux valu que les hôpitaux puissent passer d'un système à l'autre rapidement et que le cadre juridique soit clair. J'ai appris d'une expérience professionnelle précédente (en tant que ministre : NDLR) que tout est toujours plus facile en théorie qu'en pratique. Nous voulons jouer un rôle dans cette transformation du secteur. Le groupe NRB nous a permis de véritablement investir dans l'avenir et d'accompagner les hôpitaux dans leur changement. Le fait que nous soyons un acteur extrêmement important au niveau du DPI dans les hôpitaux francophones et au niveau de la gestion administrative et financière (via les outils Oazis et ERP4HC) du côté néerlandophone nous permet de soutenir l'évolution des hôpitaux. Plus on utilisera les mêmes outils informatiques au sein des réseaux et entre les réseaux, plus cette cohérence technologique sera bénéfique pour le patient. Plus les partenaires qui proposent des produits de niche pourront "dialoguer" avec le DPI, plus cela aura du sens.Qu'en est-il de vos relations avec les réseaux santé ?Nous tenons à amplifier nos relations avec l'ensemble des réseaux de santé pour améliorer encore le flux des informations. Notre positionnement n'est pas identique au nord et au sud du pays. En Flandre, avec notre produit administratif, nous avons la volonté de travailler avec l'UZ Brussel, la KU Leuven, et les autres acteurs ... pour que l'ensemble du flux administratif soit uniformisé et que le partage d'informations optimalise l'efficience des hôpitaux, toujours dans l'intérêt du patient. Cette expertise acquise avec l'intégration d'autres systèmes nous permet de renforcer notre position sur l'ensemble du territoire, aussi bien sur les aspects administratifs que médicaux.Appropriation des technologiesVous proposez, en partenariat avec la société Nuance, l'utilisation d'un logiciel de reconnaissance vocale, basée sur l'intelligence artificielle (Dragon Medical Direct). Il été installé au Grand Hôpital de Charleroi. Comment cette collaboration fonctionne-t-elle ? Melchior Wathelet : Actuellement, les hôpitaux ont plus besoin d'une solution belge qui corresponde à leurs besoins spécifiques plutôt que d'avoir une solution étrangère qui vient leur imposer une nouvelle manière de travailler. Nous devons gérer de façon transversale les demandes de nos clients pour faire avancer notre DPI. Comme nous ne pouvons pas tout produire, nous proposons des partenariats avec d'autres entreprises. Pour la reconnaissance vocale, nous collaborons avec la société américaine Nuance. Nous faisons une sorte de certification mutuelle. Il n'y a pas d'exclusivité mais nos clients savent que nos logiciels s'intègrent parfaitement. Nous collaborons également avec Earlytracks qui est un acteur spécialisé dans la structuration de données non structurées et Capsule qui est spécialisé dans la connectivité des appareils médicaux. Notre logique est de dire aux hôpitaux qu'ils ne doivent pas arrêter les partenariats qu'ils ont construits avec ces sociétés. Au contraire, nous leur proposons de maximaliser l'investissement qu'ils ont déjà réalisé.En proposant une solution de reconnaissance vocale aux médecins, nous renforçons leur envie d'utiliser notre DPI. Nous essayons d'ailleurs de faire comprendre aux hôpitaux que dans un projet informatique, la dimension humaine est aussi importante que la dimension technologique. Il est très difficile de créer un sentiment d'adoption par rapport à une nouvelle technologie. Nous comptons d'ailleurs faire appel à des entreprises spécialisées dans la formation, l'adaptation et l'appropriation. C'est un véritable métier.Entretien réalisé par Vincent Claes