La convention formalisant le Pôle hospitalier universitaire de Bruxelles (PHUB), annoncée il y a deux semaines par l'ULB et la Ville, a été rejetée par la majorité des conseils médicaux. Ce refus symbolique entend dénoncer un projet visiblement fantasmé par les instances politiques, sans stratégie médicale. Et pour cause, le bourgmestre bruxellois, Yvan Mayeur, avait jusqu'ici délibérément exclu les médecins.
Nettement moins consensuel qu'annoncé. Il nous revient que le texte fondateur du PHUB, approuvé fin juin par les administrateurs de l'ULB et le Conseil communal de la Ville de Bruxelles, a été rejeté par les conseils médicaux de Brugmann, de l'Huderf et de Saint-Pierre. Soit trois des quatre hôpitaux formant le CHU de Bruxelles (CHUB). Tout en sachant que le quatrième, l'Institut Jules Bordet, a émis des réserves.
"La raison est variable d'un hôpital à l'autre mais en ce qui nous concerne, c'est parce qu'il n'y a pas de projet médical global", estime le Pr Vincent Ninane, chef du service de pneumologie et président du conseil médical au CHU Saint-Pierre. "Il y a une tactique que j'appelle tactique du saucissonnage, où on va discuter un peu de la pneumo par exemple mais on ne sait pas si on va faire de Brugmann un hôpital de revalidation, de Saint-Pierre un hôpital aigu. Il y a assez logiquement un projet clair pour l'hôpital des Enfants et pour Bordet, puisque ces institutions ont par définition une spécialisation. Mais la véritable interrogation porte sur les deux autres CHU."
Ce refus ne vient techniquement pas faire obstacle au développement de "l'un des plus grands ensembles hospitalo-facultaires à l'échelle européenne", comme l'avaient solennellement présenté les pouvoirs locaux. Le fameux pôle, qui regroupe le CHU de Bruxelles et l'hôpital Erasme comme pilier académique, poursuit une ambition scientifique et clinique que l'augmentation de taille critique devrait faciliter. Et ce genre d'association ne nécessite pas d'avis renforcé des conseils médicaux pour se concrétiser.
Parlons-en...
Mais les rejets exprimés en nombre par les représentants des médecins ont tout de même donné lieu à une réunion (de crise) à l'initiative du bourgmestre bruxellois, Yvan Mayeur (PS), en présence également des responsables du CHU de Bruxelles.
Lors de cette entrevue dite "constructive " par les différentes parties conviées à l'Hôtel de Ville, Yvan Mayeur a reconnu que les conseils médicaux étaient "activement exclus".
"L'autre gros reproche que nous avons c'est que les conseils médicaux sont exclus. C'est une volonté d'Yvan Mayeur. Il le dit. Et ne le motive qu'au travers d'histoires corses. Le conseil médical de l'époque, quand je suis arrivé à Saint-Pierre il y a 25 ans, s'occupait de la gestion et les comptes étaient négatifs. Ce sont des reproches très anciens que Mayeur garde à l'esprit ", trouve inacceptable le Pr Vincent Ninane.
Des circonstances d'ordre plus pratique auraient également joué, nuance de son côté le Pr Jacques Devriendt, chef du service des soins intensifs et président du conseil médical du CHU Brugmann.
"Yvan Mayeur nous a expliqué que la convention devait passer comme ça, que le texte ne pouvait plus changer parce qu'il avait déjà fait l'objet de discussions et que si on voulait le modifier, cela allait tout retarder", remet en contexte le Pr Devriendt.
À l'issue de ce vif échange de vues, il a été proposé aux conseils médicaux qu'ils soient inclus au processus de construction d'ici le mois de septembre. "On ne sait pas encore sous quelle forme mais nous serons impliqués dans la politique médicale ", indique le président du conseil médical du CHU Saint-Pierre.
Promesse politique
Toute cette situation relèverait au final d'un improbable manque de dialogue. Concédons que ne pas consulter les médecins bruxellois pour faire de la capitale un centre d'excellence hospitalière semble à tout le moins paradoxal.
"C'est d'autant plus ridicule que dans la technique du saucissonnage, une fois qu'on aura traité une rondelle, un projet dans l'activité médicale, il faudra que ça passe par les conseils médicaux et là ce sera un avis renforcé. À chaque fois. Si on se passe de l'avis des conseils médicaux, il faut alors une négociation avec la direction générale de l'hôpital, il faut prendre une tierce personne venant réconcilier le directeur avec le conseil médical", croit halluciner le Pr Vincent Ninane, qui dit entretenir pourtant d'excellents rapports avec la direction médicale ou générale de l'hôpital.
Ces récents événements viennent quelque peu écorner la belle image d'une "association ambitieuse au service du patient". Surtout lorsqu'on regarde à nouveau le communiqué de presse envoyé fin juin par l'ULB et la Ville de Bruxelles. "Ce sont les médecins eux-mêmes qui dans chaque spécialité ont travaillé ou planchent actuellement pour veiller à garantir le meilleur trajet de soins possible pour le patient", assurait-il.
"De la communication purement politique. Les conseils médicaux ne sont jusqu'à présent absolument pas consultés. La promesse est que ça va changer, en septembre", espère le président du conseil du CHU Saint-Pierre.
Le texte fondateur du Pôle hospitalier n'avait certes pas à ressembler à un dossier de projet médical, mais la position des présidents des conseils qui ont rejeté la convention reste tout aussi compréhensible. Les représentants médicaux veulent simplement qu'à l'avenir les projets médicaux soient pensés par... les médecins.
"Pas seulement pour donner son aval et entériner quelque chose de tout fait ailleurs. Les médecins, ce ne sont pas les directions médicales, c'est le conseil médical notamment mais aussi tous les spécialistes des institutions. C'est ce qui nous a été promis, un espace de négociation pour impliquer tout le corps médical ", positive Jacques Devriendt. "Les choses peuvent s'arranger si tout le monde est de bonne volonté, et notamment du côté de Monsieur Mayeur".
Nettement moins consensuel qu'annoncé. Il nous revient que le texte fondateur du PHUB, approuvé fin juin par les administrateurs de l'ULB et le Conseil communal de la Ville de Bruxelles, a été rejeté par les conseils médicaux de Brugmann, de l'Huderf et de Saint-Pierre. Soit trois des quatre hôpitaux formant le CHU de Bruxelles (CHUB). Tout en sachant que le quatrième, l'Institut Jules Bordet, a émis des réserves. "La raison est variable d'un hôpital à l'autre mais en ce qui nous concerne, c'est parce qu'il n'y a pas de projet médical global", estime le Pr Vincent Ninane, chef du service de pneumologie et président du conseil médical au CHU Saint-Pierre. "Il y a une tactique que j'appelle tactique du saucissonnage, où on va discuter un peu de la pneumo par exemple mais on ne sait pas si on va faire de Brugmann un hôpital de revalidation, de Saint-Pierre un hôpital aigu. Il y a assez logiquement un projet clair pour l'hôpital des Enfants et pour Bordet, puisque ces institutions ont par définition une spécialisation. Mais la véritable interrogation porte sur les deux autres CHU." Ce refus ne vient techniquement pas faire obstacle au développement de "l'un des plus grands ensembles hospitalo-facultaires à l'échelle européenne", comme l'avaient solennellement présenté les pouvoirs locaux. Le fameux pôle, qui regroupe le CHU de Bruxelles et l'hôpital Erasme comme pilier académique, poursuit une ambition scientifique et clinique que l'augmentation de taille critique devrait faciliter. Et ce genre d'association ne nécessite pas d'avis renforcé des conseils médicaux pour se concrétiser. Parlons-en... Mais les rejets exprimés en nombre par les représentants des médecins ont tout de même donné lieu à une réunion (de crise) à l'initiative du bourgmestre bruxellois, Yvan Mayeur (PS), en présence également des responsables du CHU de Bruxelles. Lors de cette entrevue dite "constructive " par les différentes parties conviées à l'Hôtel de Ville, Yvan Mayeur a reconnu que les conseils médicaux étaient "activement exclus". "L'autre gros reproche que nous avons c'est que les conseils médicaux sont exclus. C'est une volonté d'Yvan Mayeur. Il le dit. Et ne le motive qu'au travers d'histoires corses. Le conseil médical de l'époque, quand je suis arrivé à Saint-Pierre il y a 25 ans, s'occupait de la gestion et les comptes étaient négatifs. Ce sont des reproches très anciens que Mayeur garde à l'esprit ", trouve inacceptable le Pr Vincent Ninane. Des circonstances d'ordre plus pratique auraient également joué, nuance de son côté le Pr Jacques Devriendt, chef du service des soins intensifs et président du conseil médical du CHU Brugmann. "Yvan Mayeur nous a expliqué que la convention devait passer comme ça, que le texte ne pouvait plus changer parce qu'il avait déjà fait l'objet de discussions et que si on voulait le modifier, cela allait tout retarder", remet en contexte le Pr Devriendt. À l'issue de ce vif échange de vues, il a été proposé aux conseils médicaux qu'ils soient inclus au processus de construction d'ici le mois de septembre. "On ne sait pas encore sous quelle forme mais nous serons impliqués dans la politique médicale ", indique le président du conseil médical du CHU Saint-Pierre. Promesse politique Toute cette situation relèverait au final d'un improbable manque de dialogue. Concédons que ne pas consulter les médecins bruxellois pour faire de la capitale un centre d'excellence hospitalière semble à tout le moins paradoxal. "C'est d'autant plus ridicule que dans la technique du saucissonnage, une fois qu'on aura traité une rondelle, un projet dans l'activité médicale, il faudra que ça passe par les conseils médicaux et là ce sera un avis renforcé. À chaque fois. Si on se passe de l'avis des conseils médicaux, il faut alors une négociation avec la direction générale de l'hôpital, il faut prendre une tierce personne venant réconcilier le directeur avec le conseil médical", croit halluciner le Pr Vincent Ninane, qui dit entretenir pourtant d'excellents rapports avec la direction médicale ou générale de l'hôpital. Ces récents événements viennent quelque peu écorner la belle image d'une "association ambitieuse au service du patient". Surtout lorsqu'on regarde à nouveau le communiqué de presse envoyé fin juin par l'ULB et la Ville de Bruxelles. "Ce sont les médecins eux-mêmes qui dans chaque spécialité ont travaillé ou planchent actuellement pour veiller à garantir le meilleur trajet de soins possible pour le patient", assurait-il. "De la communication purement politique. Les conseils médicaux ne sont jusqu'à présent absolument pas consultés. La promesse est que ça va changer, en septembre", espère le président du conseil du CHU Saint-Pierre. Le texte fondateur du Pôle hospitalier n'avait certes pas à ressembler à un dossier de projet médical, mais la position des présidents des conseils qui ont rejeté la convention reste tout aussi compréhensible. Les représentants médicaux veulent simplement qu'à l'avenir les projets médicaux soient pensés par... les médecins. "Pas seulement pour donner son aval et entériner quelque chose de tout fait ailleurs. Les médecins, ce ne sont pas les directions médicales, c'est le conseil médical notamment mais aussi tous les spécialistes des institutions. C'est ce qui nous a été promis, un espace de négociation pour impliquer tout le corps médical ", positive Jacques Devriendt. "Les choses peuvent s'arranger si tout le monde est de bonne volonté, et notamment du côté de Monsieur Mayeur".